Résultat d’une vie de collecte d’objets militaires glanés dans les champs aux alentours de Bullecourt, le très émouvant musée Jean & Denise Letaille nous plonge dans l’intimité de la Bataille d’Arras. L’Histoire y est palpable à travers des effets personnels et se transforme en vive émotion devant tous ces soldats australiens et britanniques qui ont perdu la vie en terre d’Artois.
Trésor de guerre
Une mitrailleuse lourde, une tourelle de tank, des bonbonnes de gaz éventrées.
Voilà sur quoi est tombé un beau jour Jean Letaille en travaillant dans ses champs.
On peine à imaginer la scène tellement elle semble surréaliste. La suite l’est tout autant. Car au lieu de jeter au rebus ces vestiges de la Grande Guerre ou de revendre à prix d’or les balles en cuivre, Jean Letaille – qui fut aussi maire de Bullecourt – les conserve comme un trésor de guerre.
Aujourd’hui, tous ces objets trouvent refuge sous la charpente de sa propre grange devenue musée. L’unique source de lumière naturelle provient des rayons du soleil qui s’immiscent dans les trous d’une énorme porte qu’on dirait… criblée de balles.
Sur la « voix » de Jean Letaille
C’est la voix de feu Jean Letaille qui accompagne le visiteur dans ce lieu chargé d’émotion.
Un amas d’obus, de fers à cheval, de fils barbelé, de fusils et de tout ce qui constitue l’attirail d’un militaire de la Première Guerre mondiale. La mise en scène est brutale. Autour, les vitrines peuplées d’objet personnels alignés comme des soldats de plomb tranchent avec le désordre de la fosse centrale. Mais peut-être celui-ci rejoue-t-il les deux batailles de Bullecourt qui firent au printemps 1917 17 000 morts dans les rangs australiens et britanniques ?
Le musée Letaille est une allégorie permanente : il explique en montrant. Une scie chirurgicale en dit long sur le rôle du personnel soignant, un étui à cigarettes évoque le répit, un courrier incarne l’espoir de revoir ses proches. La visite s’achève d’ailleurs sur une série de visages qu’on croirait presque de notre famille.